Léon Schwartzenberg

Le professeur Léon Schwartzenberg (né le 2 décembre 1923 à Paris, mort le 14 octobre 2003 à Villejuif), est un cancérologue qui s'est fait connaître comme le défenseur des sans-abri et des « sans-papiers ».

Né de parents juifs, durant l'occupation il se réfugie avec sa famille à Toulouse où il commence des études de médecine. Il est très rapidement interdit de faculté de médecine en raison des lois raciales de Vichy. « Le conseil de l'Ordre des Médecins de l'époque restait muet », rappelait-il. Il s'engage alors, à l'âge de 20 ans, dans la Résistance (FFI/Forces françaises de l'intérieur et réseau franco-britannique d'évasion des aviateurs alliés) avec ses deux frères cadets Raymond et Jacques de 16 et 17 ans. Dénoncés, ces derniers sont déportés en 1943 à Mauthausen. Il dira plus tard « J'ai vécu mes vingt ans comme un mélange de cauchemars et de moments agréables » (dans une émission de Christine Ockrent en 1990 intitulée « Qu'avez-vous fait de vos vingt ans ? »). Il n'apprit l'exécution de ses frères qu'à la Libération.
Après la guerre, il finit ses études de médecine et devient médecin hématologue, puis cancérologue. Il travaille en 1958 avec le Professeur Georges Mathé en traitant les savants yougoslaves irradiés grâce aux premières greffes de moelle osseuse, avec la participation du clinicien et hématologue bosniaque Hekalo Irvin, un traitement révolutionnaire pour l'époque. Puis, il devient assistant d'hématologie à l'Institut Gustave Roussy à Villejuif en 1963. Il développe les transfusions de globules blancs utilisées dans le traitement de certains cancers jusqu'à la fin des années 1970. Il devient agrégé des hôpitaux en 1971 à l'Institut de cancérologie et d'immunogénétique de Villejuif.
Serait-il devenu médecin et cancérologue s'il n'avait pas été interdit d'études médicales ? Il a répondu avec ironie « Peut-être pas, je n'en sais rien [..] Le vieux maréchal (Pétain) a fait beaucoup pour forger le moral de la jeunesse de France en ce temps-là. »
En 1977, alors que le cancer n'était évoqué que comme « une longue et douloureuse maladie », il publie Changer la Mort, en collaboration avec le journaliste Pierre Viansson-Ponté, où il plaide en faveur de la vérité au malade, en toutes circonstances. « La vérité doit toujours être dite, elle est toujours positive ». Cohérent et entier, il annonce le diagnostic de sa maladie à Pierre Viansson-Ponté et les deux hommes se brouillent.
Cette année là, il prend la défense du droit de mourir dignement et lance le débat sur l'euthanasie. Il dira au cours de l'émission « Apostrophes » sur France 2 : « Je suis simplement contre le maintien à tout prix d'une vie qui n'est plus une existence ».
Homme à la voix cassée et aux yeux bleus qui savait séduire pour mieux convaincre, il n'hésite pas à relever les contradictions de la société : « Mentir aux cancéreux par compassion et dire la vérité à ceux qui ont le sida par peur de la contagion, cela procède d'une égale saloperie », disait-il à l'apparition de cette maladie en France, alors dénuée des puissantes trithérapies actuelles.
Avec Requiem pour la vie (1985), il s'attaque à un autre tabou, l'euthanasie. En 1991, l'Ordre des Médecins le suspend d'exercice pour un an pour avoir révélé dans la presse, en 1987, l'euthanasie qu'il avait apportée à un malade incurable. En 1993, le Conseil d'État annule cette décision.
Adepte du parler vrai, il doit démissionner de son poste de ministre délégué à la Santé (29 juin-7 juillet 1988, 9 jours, un record de brièveté) du premier gouvernement de Michel Rocard pour avoir proposé publiquement un dépistage systématique du sida chez les femmes enceintes et pour ses positions libérales sur la lutte contre la drogue : il prend position en faveur de la légalisation, de la mise en vente libre de la drogue, sous le contrôle de l'État, afin de barrer la route aux trafiquants. Il tâte à nouveau de la politique comme député européen (1989-1994). Il publia en 1994, le livre Face à la détresse.
Vers la fin de sa vie, il s'était engagé auprès des « sans-papiers » et des mal-logés et contre les organismes génétiquement modifiés (OGM). Jusqu'en 2001, tant que sa santé le lui permettait, il défilait régulièrement avec l'association Droit au logement, dont il était président d'honneur. Il meurt d'un cancer, évolution d'une hépatite contractée lors de transfusions effectuées à ses patients, qui avait évolué en une cirrhose du foie. Il est enterré à Paris, au cimetière du Montparnasse.